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Poésie et prose
(Sujet créé par Eltharion l 23/04/05 à 21:42)
Voilà un petit espace créé pour que ceux qui le veulent puissent faire partager des poèmes et des passages littéraires qu'ils aiment particulièrement. Vous pouvez aussi parler d'auteurs et de mouvements que vous appréciez.
Inutile de préciser qu'aucun détournement ne sera toléré
Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon.
Nous marchions sans parler, dans l'humide gazon,
Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes,
Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
Nous avons aperçu les grands ongles marqués
Par les loups voyageurs que nous avions traqués.
Nous avons écouté, retenant notre haleine
Et le pas suspendu. -- Ni le bois, ni la plaine
Ne poussait un soupir dans les airs ; Seulement
La girouette en deuil criait au firmament ;
Car le vent élevé bien au dessus des terres,
N'effleurait de ses pieds que les tours solitaires,
Et les chênes d'en-bas, contre les rocs penchés,
Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés.
Rien ne bruissait donc, lorsque baissant la tête,
Le plus vieux des chasseurs qui s'étaient mis en quête
A regardé le sable en s'y couchant ; Bientôt,
Lui que jamais ici on ne vit en défaut,
A déclaré tout bas que ces marques récentes
Annonçait la démarche et les griffes puissantes
De deux grands loups-cerviers et de deux louveteaux.
Nous avons tous alors préparé nos couteaux,
Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches,
Nous allions pas à pas en écartant les branches.
Trois s'arrêtent, et moi, cherchant ce qu'ils voyaient,
J'aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient,
Et je vois au delà quatre formes légères
Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères,
Comme font chaque jour, à grand bruit sous nos yeux,
Quand le maître revient, les lévriers joyeux.
Leur forme était semblable et semblable la danse ;
Mais les enfants du loup se jouaient en silence,
Sachant bien qu'à deux pas, ne dormant qu'à demi,
Se couche dans ses murs l'homme, leur ennemi.
Le père était debout, et plus loin, contre un arbre,
Sa louve reposait comme celle de marbre
Qu'adorait les romains, et dont les flancs velus
Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus.
Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées
Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris ;
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
Du chien le plus hardi la gorge pantelante
Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair
Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang ;
Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
Il nous regarde encore, ensuite il se recouche,
Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche,
Et, sans daigner savoir comment il a péri,
Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.
J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
Sans ses deux louveteaux la belle et sombre veuve
Ne l'eût pas laissé seul subir la grande épreuve ;
Mais son devoir était de les sauver, afin
De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
A ne jamais entrer dans le pacte des villes
Que l'homme a fait avec les animaux serviles
Qui chassent devant lui, pour avoir le coucher,
Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C'est vous qui le savez, sublimes animaux !
A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse
Seul le silence est grand ; tout le reste est faiblesse.
- Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au coeur !
Il disait : " Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. "
Edit: De Vigny a écrit ce texte à la suite d’une série de difficultés dans sa vie. Il était choqué par son époque, sa mère est morte et il s’est séparé de sa femme. Dans ce poème, il met en avant le stoïcisme.
Beaucoup de poèmes sont éparpillés en ma mémoire,
Des bouts, des fragments, des traces m'en restent.
Mais de complet ? Rien. Que des chansons à boire !
Pourtant un me vient à l'esprit qui ne soit pas leste.
Baudelaire - Au lecteur
La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.
Nos pêchés sont têtus, nos repentirs sont lâches;
Nous nous faisons grassement payer nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos tâches.
Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste.
C'est le diable qui tient les fils qui nous remuent!
Aux objets répugnants nous trouvons des appas;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers les ténèbres qui puent.
Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.
Serré, fourmillant, comme un million d'helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de démons,
Et, quand nous respirons, la Mort dans nos poumons
Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.
Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encore brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,
C'est que notre âme, hélas! N'est pas assez hardie.
Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices,
Il est un plus laid, plus méchant, plus immonde!
Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde;
C'est l'Ennui!- l'œil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,
-Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère!
Voilà un poème très court, mais très prenant de Mallarmé:
Angoisse
Je ne viens pas ce soir vaincre ton corps, ô bête
En qui vont les péchés d'un peuple, ni creuser
Dans tes cheveux impurs une triste tempête
Sous l'incurable ennui que verse mon baiser :
Je demande à ton lit le lourd sommeil sans songes
Planant sous les rideaux inconnus du remords,
Et que tu peux goûter après tes noirs mensonges,
Toi qui sur le néant en sais plus que les morts :
Car le Vice, rongeant ma native noblesse,
M'a comme toi marqué de sa stérilité,
Mais tandis que ton sein de pierre est habité
Par un cœur que la dent d'aucun crime ne blesse,
Je fuis, pâle, défait, hanté par mon linceul,
Ayant peur de mourir lorsque je couche seul.
J'ai un ami qui est en Lettres; il m'a raconté qu'un de ses profs lui avait dit que des journalistes belges, désespérés par la nouvelle littérature (du genre biographies de stars etc...), avaient tenté une expérience:
Ils ont envoyé à dix maisons d'édition différentes les Chants de Maldoror, de Lautréamont. Ces journalistes ont en fait envoyé cette oeuvre sous un pseudonyme, pour faire croire qu'il s'agissait d'un auteur contemporain essayant de se faire publier. Résultat: 6 maisons n'ont même pas daigné répondre, 3 ont refusé et la dernière a reconnu l'oeuvre, tout simplement parce-qu'elle était celle qui publiait Lautréamont.
Incroyable! je vous laisse quand même juger du talent de cet homme; voilà la cinquième strophe du premier chant de Maldoror:
J’ai vu, pendant toute ma vie, sans en excepter un seul, les hommes, aux épaules étroites, faire des actes stupides et nombreux, abrutir leurs semblables, et pervertir les âmes par tous les moyens. Ils appellent les motifs de leurs actions : la gloire. En voyant ces spectacles, j’ai voulu rire comme les autres ; mais cela, étrange imitation, était impossible. J’ai pris un canif dont la lame avait un tranchant acéré, et me suis fendu les chairs aux endroits où se réunissent les lèvres. Un instant je crus mon but atteint. Je regardai dans un miroir cette bouche meurtrie par ma propre volonté ! C’était une erreur ! Le sang qui coulait avec abondance des deux blessures empêchait d’ailleurs de distinguer si c’était là vraiment le rire des autres. Mais, après quelques instants de comparaison, je vis bien que mon rire ne ressemblait pas à celui des humains, c’est-à-dire que je ne riais pas. J’ai vu des hommes, à la tête laide et aux yeux terribles enfoncés dans l’orbite obscur, surpasser la dureté du roc, la rigidité de l’acier fondu, la cruauté du requin, l’insolence de la jeunesse, la fureur insensée des criminels, les trahisons de l’hypocrite, les comédiens les plus extraordinaires, la puissance de caractère des prêtres, et les êtres les plus cachés au-dehors, les plus froids des mondes et du ciel ; lasser les moralistes à découvrir leur coeur, et faire retomber sur eux la colère implacable d’en haut. Je les ai vus tous à la fois, tantôt, le poing le plus robuste dirigé vers le ciel, comme celui d’un enfant déjà pervers contre sa mère, probablement excités par quelque esprit de l’enfer, les yeux chargés d’un remords cuisant en même temps que haineux, dans un silence glacial, n’oser émettre les méditations vastes et ingrates que recelait leur sein, tant elles étaient pleines d’injustice et d’horreur, et attrister de compassion le Dieu de miséricorde ; tantôt, à chaque moment du jour, depuis le commencement de l’enfance jusqu’à la fin de la vieillesse, en répandant des anathèmes incroyables, qui n’avaient pas le sens commun, contre tout ce qui respire, contre eux-mêmes et contre la providence, prostituer les femmes et les enfants, et déshonorer ainsi les parties du corps consacrées à la pudeur. Alors, les mers soulèvent leurs eaux, engloutissent dans leurs abîmes les planches ; les ouragans, les tremblements de terre renversent les maisons, la perte, les maladies diverses déciment les familles priantes. Mais, les hommes ne s’en aperçoivent pas. Je les ai vus aussi rougissant, pâlissant de honte pour leur conduite sur cette terre ; rarement. Tempêtes, soeurs des ouragans ; firmament bleuâtre, dont je n’admets pas la beauté ; mer hypocrite, image de mon coeur ; terre, au sein mystérieux ; habitants des sphères ; univers entier ; Dieu, qui l’as créé avec magnificence, c’est toi que j’invoque : montre-moi un homme qui soit bon !... Mais, que ta grâce décuple mes forces naturelles ; car, au spectacle de ce monstre, je puis mourir d’étonnement ; on meurt à moins.
Chevalier un jour, Chevalier toujours ! Montjoie Saint Denis et Tutti Quanti !
Mon poème favori et mon poète préféré( avec Georges Brassens, deux Sétois)
Et dire qu'à une époque je le connaissais par coeur
Le Cimetière Marin
Paul Valéry
Ce toit tranquille, où marchent des colombes,
Entre les pins palpite, entre les tombes;
Midi le juste y compose de feux
La mer, la mer, toujours recommencee
O récompense après une pensée
Qu'un long regard sur le calme des dieux!
Quel pur travail de fins éclairs consume
Maint diamant d'imperceptible écume,
Et quelle paix semble se concevoir!
Quand sur l'abîme un soleil se repose,
Ouvrages purs d'une éternelle cause,
Le temps scintille et le songe est savoir.
Stable trésor, temple simple à Minerve,
Masse de calme, et visible réserve,
Eau sourcilleuse, Oeil qui gardes en toi
Tant de sommeil sous une voile de flamme,
O mon silence! . . . Édifice dans l'âme,
Mais comble d'or aux mille tuiles, Toit!
Temple du Temps, qu'un seul soupir résume,
À ce point pur je monte et m'accoutume,
Tout entouré de mon regard marin;
Et comme aux dieux mon offrande suprême,
La scintillation sereine sème
Sur l'altitude un dédain souverain.
Comme le fruit se fond en jouissance,
Comme en délice il change son absence
Dans une bouche où sa forme se meurt,
Je hume ici ma future fumée,
Et le ciel chante à l'âme consumée
Le changement des rives en rumeur.
Beau ciel, vrai ciel, regarde-moi qui change!
Après tant d'orgueil, après tant d'étrange
Oisiveté, mais pleine de pouvoir,
Je m'abandonne à ce brillant espace,
Sur les maisons des morts mon ombre passe
Qui m'apprivoise à son frêle mouvoir.
L'âme exposée aux torches du solstice,
Je te soutiens, admirable justice
De la lumière aux armes sans pitié!
Je te tends pure à ta place première,
Regarde-toi! . . . Mais rendre la lumière
Suppose d'ombre une morne moitié.
O pour moi seul, à moi seul, en moi-même,
Auprès d'un coeur, aux sources du poème,
Entre le vide et l'événement pur,
J'attends l'écho de ma grandeur interne,
Amère, sombre, et sonore citerne,
Sonnant dans l'âme un creux toujours futur!
Sais-tu, fausse captive des feuillages,
Golfe mangeur de ces maigres grillages,
Sur mes yeux clos, secrets éblouissants,
Quel corps me traîne à sa fin paresseuse,
Quel front l'attire à cette terre osseuse?
Une étincelle y pense à mes absents.
Fermé, sacré, plein d'un feu sans matière,
Fragment terrestre offert à la lumière,
Ce lieu me plaît, dominé de flambeaux,
Composé d'or, de pierre et d'arbres sombres,
Où tant de marbre est tremblant sur tant d'ombres;
La mer fidèle y dort sur mes tombeaux!
Chienne splendide, écarte l'idolâtre!
Quand solitaire au sourire de pâtre,
Je pais longtemps, moutons mystérieux,
Le blanc troupeau de mes tranquilles tombes,
Éloignes-en les prudentes colombes,
Les songes vains, les anges curieux!
Ici venu, l'avenir est paresse.
L'insecte net gratte la sécheresse;
Tout est brûlé, défait, reçu dans l'air
A je ne sais quelle sévère essence . . .
La vie est vaste, étant ivre d'absence,
Et l'amertume est douce, et l'esprit clair.
Les morts cachés sont bien dans cette terre
Qui les réchauffe et sèche leur mystère.
Midi là-haut, Midi sans mouvement
En soi se pense et convient à soi-même
Tête complète et parfait diadème,
Je suis en toi le secret changement.
Tu n'as que moi pour contenir tes craintes!
Mes repentirs, mes doutes, mes contraintes
Sont le défaut de ton grand diamant! . . .
Mais dans leur nuit toute lourde de marbres,
Un peuple vague aux racines des arbres
A pris déjà ton parti lentement.
Ils ont fondu dans une absence épaisse,
L'argile rouge a bu la blanche espèce,
Le don de vivre a passé dans les fleurs!
Où sont des morts les phrases familières,
L'art personnel, les âmes singulières?
La larve file où se formaient les pleurs.
Les cris aigus des filles chatouillées,
Les yeux, les dents, les paupières mouillées,
Le sein charmant qui joue avec le feu,
Le sang qui brille aux lèvres qui se rendent,
Les derniers dons, les doigts qui les défendent,
Tout va sous terre et rentre dans le jeu!
Et vous, grande âme, espérez-vous un songe
Qui n'aura plus ces couleurs de mensonge
Qu'aux yeux de chair l'onde et l'or font ici?
Chanterez-vous quand serez vaporeuse?
Allez! Tout fuit! Ma présence est poreuse,
La sainte impatience meurt aussi!
Maigre immortalité noire et dorée,
Consolatrice affreusement laurée,
Qui de la mort fais un sein maternel,
Le beau mensonge et la pieuse ruse!
Qui ne connaît, et qui ne les refuse,
Ce crâne vide et ce rire éternel!
Pères profonds, têtes inhabitées,
Qui sous le poids de tant de pelletées,
Êtes la terre et confondez nos pas,
Le vrai rongeur, le ver irréfutable
N'est point pour vous qui dormez sous la table,
Il vit de vie, il ne me quitte pas!
Amour, peut-être, ou de moi-même haine?
Sa dent secrète est de moi si prochaine
Que tous les noms lui peuvent convenir!
Qu'importe! Il voit, il veut, il songe, il touche!
Ma chair lui plaît, et jusque sur ma couche,
À ce vivant je vis d'appartenir!
Zénon! Cruel Zénon! Zénon d'Êlée!
M'as-tu percé de cette flèche ailée
Qui vibre, vole, et qui ne vole pas!
Le son m'enfante et la flèche me tue!
Ah! le soleil . . . Quelle ombre de tortue
Pour l'âme, Achille immobile à grands pas!
Non, non! . . . Debout! Dans l'ère successive!
Brisez, mon corps, cette forme pensive!
Buvez, mon sein, la naissance du vent!
Une fraîcheur, de la mer exhalée,
Me rend mon âme . . . O puissance salée!
Courons à l'onde en rejaillir vivant.
Oui! grande mer de delires douée,
Peau de panthère et chlamyde trouée,
De mille et mille idoles du soleil,
Hydre absolue, ivre de ta chair bleue,
Qui te remords l'étincelante queue
Dans un tumulte au silence pareil
Le vent se lève! . . . il faut tenter de vivre!
L'air immense ouvre et referme mon livre,
La vague en poudre ose jaillir des rocs!
Envolez-vous, pages tout éblouies!
Rompez, vagues! Rompez d'eaux rejouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs!
Ah! Allez, du Brassens dans la continuité du poème de Valéry, en rupture aussi
Georges Brassens
Supplique pour être enterré sur une plage de Sète
La Camarde qui ne m'a jamais pardonné,
D'avoir semé des fleurs dans les trous de son nez,
Me poursuit d'un zèle imbécile.
Alors cerné de près par les enterrements,
J'ai cru bon de remettre à jour mon testament,
De me payer un codicille.
Trempe dans l'encre bleue du Golfe du Lion,
Trempe, trempe ta plume, ô mon vieux tabellion,
Et de ta plus belle écriture,
Note ce qu'il faudra qu'il advint de mon corps,
Lorsque mon âme et lui ne seront plus d'accord,
Que sur un seul point : la rupture.
Quand mon âme aura pris son vol à l'horizon,
Vers celle de Gavroche et de Mimi Pinson,
Celles des titis, des grisettes.
Que vers le sol natal mon corps soit ramené,
Dans un sleeping du Paris-Méditerranée,
Terminus en gare de Sète.
Mon caveau de famille, hélas ! n'est pas tout neuf,
Vulgairement parlant, il est plein comme un œuf,
Et d'ici que quelqu'un n'en sorte,
Il risque de se faire tard et je ne peux,
Dire à ces braves gens : poussez-vous donc un peu,
Place aux jeunes en quelque sorte.
Juste au bord de la mer à deux pas des flots bleus,
Creusez si c'est possible un petit trou moelleux,
Une bonne petite niche.
Auprès de mes amis d'enfance, les dauphins,
Le long de cette grève où le sable est si fin,
Sur la plage de la corniche.
C'est une plage où même à ses moments furieux,
Neptune ne se prend jamais trop au sérieux,
Où quand un bateau fait naufrage,
Le capitaine crie : "Je suis le maître à bord !
Sauve qui peut, le vin et le pastis d'abord,
Chacun sa bonbonne et courage".
Et c'est là que jadis à quinze ans révolus,
A l'âge où s'amuser tout seul ne suffit plus,
Je connu la prime amourette.
Auprès d'une sirène, une femme-poisson,
Je reçu de l'amour la première leçon,
Avalai la première arête.
Déférence gardée envers Paul Valéry,
Moi l'humble troubadour sur lui je renchéris,
Le bon maître me le pardonne.
Et qu'au moins si ses vers valent mieux que les miens,
Mon cimetière soit plus marin que le sien,
Et n'en déplaise aux autochtones.
Cette tombe en sandwich entre le ciel et l'eau,
Ne donnera pas une ombre triste au tableau,
Mais un charme indéfinissable.
Les baigneuses s'en serviront de paravent,
Pour changer de tenue et les petits enfants,
Diront : chouette, un château de sable !
Est-ce trop demander : sur mon petit lopin,
Planter, je vous en prie une espèce de pin,
Pin parasol de préférence.
Qui saura prémunir contre l'insolation,
Les bons amis venus faire sur ma concession,
D'affectueuses révérences.
Tantôt venant d'Espagne et tantôt d'Italie,
Tous chargés de parfums, de musiques jolies,
Le Mistral et la Tramontane,
Sur mon dernier sommeil verseront les échos,
De villanelle, un jour, un jour de fandango,
De tarentelle, de sardane.
Et quand prenant ma butte en guise d'oreiller,
Une ondine viendra gentiment sommeiller,
Avec rien que moins de costume,
J'en demande pardon par avance à Jésus,
Si l'ombre de sa croix s'y couche un peu dessus,
Pour un petit bonheur posthume.
Pauvres rois pharaons, pauvre Napoléon,
Pauvres grands disparus gisant au Panthéon,
Pauvres cendres de conséquence,
Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la vague en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances.
Vous envierez un peu l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la plage en rêvant,
Qui passe sa mort en vacances,
Quel dommage que sa supplique n'ait pas été écouté. Georges repose au cimetière des Pauvres qui regarde du côté de l'étang, pas de la mer.
There's something rotten in the kingdom of Blizzard...Chevalier du Haut Verbeex Responsable des CL / Membre du Conseil RP / Modérateur / Newser
Le vin sait revêtir le plus sordide bouge
d'un luxe miraculeux,
et fait surgir plus d'un portique fabuleux
dans l'or de sa vapeur rouge,
comme un soleil couchant sur un ciel nébuleux.
L'opium agrandit ce qui n'a pas de bornes,
allonge l'illimité,
appronfondit le temps, creuse la volupté,
et de plaisirs noirs et mornes,
remplit l'âme au delà de sa capacité.
Tout cela ne vaut pas le poison qui découle
de tes yeux, de tes yeux verts,
lacs où mon âme tremble et se voit à l'envers,
mes songes viennent en foule
pour se désaltérer à ces gouffres amers.
Tout cela ne vaut pas le terrible prodige
de ta salive qui mord,
qui plonge dans l'oubli mon âme sans remords
et, charriant le vertige,
la roule défaillante aux rives de la mort.
Il est amer et doux, pendant les nuits d'hiver,
D'écouter, près du feu qui palpite et qui fume,
Les souvenirs lointains lentement s'élever
Au bruit des carillons qui chantent dans la brume.
Bienheureuse la cloche au gosier vigoureux
Qui, malgré sa vieillesse, alerte et bien portante,
Jette fidèlement son cri religieux,
Ainsi qu'un vieux soldat qui veille sous la tente!
Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu'en ses ennuis
Elle veut de ses chants peupler l'air froid des nuits,
Il arrive souvent que sa voix affaiblie
Semble le râle épais d'un blessé qu'on oublie
Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts,
Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts.
Lisez KhimairaMénestrelle [/link] I like being a mess. It's who I am.
Superbe idée Ithilarin
Un peu de poésie "en VO", pour changer. Texte que vous reconnaîtrez si vous avez vu "Quatre mariages et un enterrement", le film qui m'a permis de découvrir ce merveilleux clown triste qu'est WH Auden.
Funeral Blues
Stop all the clocks, cutt off the telephone,
Prevent the dog from barking with a juicy bone,
Silence the pianos and with muffled drum
Bring out the coffin, let the mourners come.
Let aeroplanes circle moaning overhead
Scribbling on the sky the message He Is Dead,
Put crêpe bows round the white necks of the public doves,
Let the traffic policemen wear black cotton gloves.
He was my North, my South, my East and West,
My working week and my Sunday rest,
My noon, my midnight, my talk, my song ;
I thought that love would last for ever: I was wrong.
The stars are not wanted now: put out every one;
Pack up the moon and dismantle the sun;
Pour away the ocean and sweep up the wood;
For nothing now can ever come to any good.
WH Auden.
Il est à noter, pour les amateurs, qu'une sélection de poèmes de cet auteur vient de paraître en nrf/poésie gallimard (la collection de poche, couverture blanche et bande colorée où vous pouvez apercevoir la bouille de celui que vous lisez).
Et voici un petit extrait de l'oeuvre de JP Rosnay, un de nos grands poètes contemporains, ami de Queneau et Desnos, qui continue d'entretenir sur Paris une sorte de cabaret de la poésie organisant des dîners-lectures tous les jeudi soir !
Ordre du Jour
Tenir l'âme en état de marche
Tenir le contingent à distance
Tenir l'âme au-dessus de la mêlée
Tenir Dieu pour une idée comme une autre
un support, une éventualité,
une contrée sauvage de l'univers poétique
Tenir les promesses de son enfance
Tenir tête à l'adversité
Ne pas épargner l'adversaire
Tenir parole ouverte
Tenir la dragée haute à ses faiblesses
Ne pas se laisser emporter par le courant
Tenir son rang dans le rang de ceux qui sont décidés
à tenir l'homme en position estimable
Ne pas se laisser séduire par la facilité
sous le prétexte que les pires
se haussent commodément au plus haut niveau
et que les meilleurs ont peine à tenir la route
Etre digne du privilège d'être
sous la forme la plus réussie: l'homme.
Ou mieux encore, la femme.
Lisez KhimairaMénestrelle [/link] I like being a mess. It's who I am.
Un peu de prose, pour changer, fort poétique car l'auteur aime analyser la poésie (je vous conseille le très bel ouvrage Du lyrisme chez José Corti, ou Le poète perplexe, même éditeur)comme l'écrire (Dans l'interstice , aux éditions Fata Morgana). Des phrases courtes, douces,rondes, en quête de bleu (d'azur,si j'ose ce clin d'oeil) et d'absolu. Enfin c'est un poète, quoi Je n'ai pas encore lu sa dernière production, je me suis arrêté à la belle Histoire de bleu, des variations autour d'une couleur, de l'amour et de la mer. Un dialogue entre l'infini et le sacré, redécouverts entre les plis du quotidin. Un ouvrage apaisant et rêveur.
Une collection de phrases
Je suis atteint d'un mal curieux : mon corps est plein de phrases. Troué de paroles et mangé de vers, il n'est plus remué que de ces créatures voraces qui le vident lentement de sa substance. Des mots prospèrent sur mon ignorance, avalent ce que bon leur semble, éprouvent ce qui leur plaît. Ils existent à ma place. Je perçois de plus en plus mal la lumière du jour. je n'habite plus vraiment ce monde. Mon coeur n'est plus à moi : je suis une collection de phrases.
Je ne sais plus d'où ni de qui elles viennent. Impossible de distinguer entre celles que j'ai lues naguère et celles que j'ai moi-même écrites. Mes propres livres me sont obscurs. Je parle avec les mots des autres. Je ne suis plus une personne, mais une sorte de catalogue de formules et de visages. Autrui m'est plus proche que moi-même. Je n'ai plus de pensée, seulement des musiques d'adoption.
Je me suis accoutumé à cette maladie. J'y trouve aussi quelque plaisir. "Moi" est si peu de chose. La dépossession est sa chance. "Bonjour", "bonsoir", "comment vas-tu ?", "je t'aime, je t'aime tant, mon amour" : les mots d'autrui sont familiers et secourables. Je sais gré à des phrases de prendre soin de mon sort. Loin de se refermer sur de solides certitudes, elles demeurent entrouvertes : elles tremblent d'une énigme, elles adressent une invite.
Leur timbre serait-il si clair, seraient-elles si promptes à se fixer dans l'esprit, si elles ne formulaient que la dérisoire vérité dont vivre nous inflige jour après jour les discordances ? Ces mots font autre chose : ils chantent. Sans même y prendre garde, ils protègent de mourir. Ils ne disent pas ce qui doit être pour toujours, ils dessinent des jardins, inventent un jour tout neuf, ou dorment dans le bleu.
Je ne désire pas raconter d'histoires. Je veux entendre sur la page des voix quelconques d'hommes et de femmes interpellant un grand silence. Des voix hésitantes ou craintives, mais qui sonnent juste, comme celles que l'on écoutait naguère chanter dans les églises et qui, peut-être, croyaient savoir. Des voix où transitaient les dieux. Où la mort même pouvait se dire en dépit de ses os brisés.
De telles voix s'élèvent peu. On ne les entend guère. L'amour y rend un son mat. Le coeur bat sans tapage : il faut dresser l'oreille pour en connaître le murmure. Mais il reste beaucoup de plages, de faubourgs où l'on rentre tard, et de jardins d'après l'averse. Assez pour survivre longtemps, beaucoup moins seul qu'il n'y paraît, penché au-desssus des pages blanches, ou tourné vers la fenêtre, essayant de dévisager le bleu.
Sans doute ne saurai-je jamais qui je suis ni où je suis. Sans doute ne serai-je jamais sûr d'avoir été quelqu'un. Tous les mots que j'abandonne derrière moi semblent se souvenir de l'homme que rêva d'être l'enfant que je fus. Je me tiens en eux comme une ombre, près de mon vrai visage, n'essayant plus de m'en vêtir, apaisé simplement de le regarder comme si c'était celui d'un autre.
L'encre s'en va avec les jours, traçant ses lignes, tournant les pages, gardant pour soi l'obscur, essayant tant bien que mal de n'en point parler, se répétant sans cesse qu'il faudra mourir, et que vivre n'est que retenir ses larmes, s'abandonner un peu, puis se reprendre à temps, ajuster l'amour au mourir, et s'appliquer à parler juste dans l'incertain, attendre et s'en aller, comme patientent et s'en vont les mots, afin de se déshabituer de n'être rien.
Aimer encore cela qui nous emporte et nous défait, puisque cela est notre bien. Ces jours sans aventure, ces gestes identiques, ce temps perdu, et l'abandon du faux espoir, et la douceur du soir après la pluie, tous les enfants qu'on n'aura pas, tout l'amour qu'on ne fera plus, la croix, le sac et le couvercle, avec des fleurs tressées, des cris mal contenus et des mouchoirs mouillés.
Nous écrivons des livres qui durent plus que nous. Cela accroît notre chagrin. Je me répète sur le papier le peu que je suis. Plus une phrase est belle, plus elle me désespère, plus elle est exacte. Ce qu'elle dit importe moins que ce à quoi elle se mesure. Ce n'est peut-être qu'un geste pour rien, un de ceux que parfois l'on esquisse dans la nuit en direction de ses semblables, quand il n'y a plus personne. Un geste anxieux d'amour, immense et sans objet.
Jean-Michel Maulpoix
Ce soir, si j'ai le temps, une page de ce cher Proust Là, j'ai triché, ce sont des textes que j'ai recopié du temps où j'avais encore le temps d'animer un café littéraire et philosophique sur internet (elle est loin la terminale...).
un poème qui ne retourne à chaque fois que je le lis mais que je peux m'empecher de lire : In flanders Fields de John Mac Crae, soldat pdt la Première Guerre Mondiale
In Flanders Fields
In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row,
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.
We are the Dead. Short days ago
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved, and were loved, and now we lie
In Flanders fields.
Take up our quarrel with the foe:
To you from failing hands we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields.
[edit : apparemment le post avec le poème de prevert à disparu alors...]
Sinon Rimbaud aussi, je remercie mon prof de français de 4e qui, en nous faisant apprendre par coeur des poèmes, m'a donné le goût de la langue francaise... merci !
Ma bohème
Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées;
Mon paletot soudain devenait idéal;
J'allais sous le ciel, Muse, et j'étais ton féal;
Oh! là là! que d'amours splendides j'ai rêvées!
Mon unique culotte avait un large trou.
Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou
Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur;
Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon coeur!
Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !
Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.
Baudelaire, un de mes poètes préférés. Voici le premier texte de cet auteur que j'ai découvert; il a, sans aucun doute, été la porte qui m'a ouvert ce monde, il garde à mes yeux une valeur sentimentale.
A une passante
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !
Merci pour ce topic ainsi qu'à ceux qui l'alimentent, à mes yeux, c'est une véritable bouffée de beauté et, j'espère, de futures découvertes.
> Ithilarin : je ne connaissais pas le poème de Carrol mais c'est assez extraordinaire à voix haute !
Ca m'inspire ça
To my apprentice Thy poem is wonderful
and left me wondering
what was its hidden rule
so strange it was and amazing.
Et puisque nous en sommes à aller chercher au dela des frontières, voici ce qui n'est pas un poème stricto censu car il fut chanté par Marlene Dietrich :
Sag mir, wo die Blumen sind,
Wo sind sie geblieben?
Sag mir, wo die Blumen sind,
Was ist gescheh'n?
Sag mir, wo die Blumen sind,
Mädchen pflückten sie geschwind.
Wann wird man je versteh'n,
Wann wird man je versteh'n?
Sag mir, wo die Mädchen sind
Männer nahmen sie geschwind.
Sag mir, wo die Männer sind
Zogen fort, der Krieg beginnt.
Sag, wo die Soldaten sind
Über Gräbern weht der Wind.
Sag mir, wo die Gräber sind
Blumen weh'n im Sommerwind.
'Tis only Carroll and his twisted mind
That left those curious but so bright lines
May we read them aloud for long and good
To make other minds sparkle as they should!
EL DESDICHADO
Gérard de Nerval
Je suis le ténébreux, - le veuf, - l'inconsolé,
Le prince d'Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte, - et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la Mélancolie.
Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le pampre à la rose s'allie.
Suis-je Amour ou Phébus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la reine;
J'ai rêvé dans la grotte où nage la sirène...
Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.
[edit : apparemment le post avec le poème de prevert à disparu alors...]
tout ce que je sais c'est que la disparition du Prévert n'est aucunement lié a ma volonté...Peut etre quelqu'un a t il cru qu'il était incomplet...?
Si c'est le cas, je jure que c'etait bel et bien le poeme en entier retranscrit ici... :