La Pierre de Tear fait peau neuve ! L'aventure continue sur www.pierredetear.fr !
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La tempête allait se déchaîner.
Au dessus du village, agité en ce jour comme une fourmilière, se dressaient de gros nuages noirs annonceurs de pluie, dans un ciel si sombre et si opaque qu'il ressemblait à un couvercle de fonte, à une châpe de plomb prête à s'affaisser à tout instant.
«
Un temps parfait
», songea Arfaël en le contemplant de ses yeux bleus dénués d'expression aussi bien que d'âge.
Vêtu de sa cape noire au capuchon rabattu, il marchait d'un pas vif dans le dédale des ruelles de la petite ville déjà désertes, hormi les chiens et la vermine qui y grouillait. Le bruit de ses talons ferrés scandait sa marche, claquant sur les pavés salis par le répugnant contenu de vases d'aisances... Tout semblait calme, mort, désert...
Pourtant l'air frémissait d'un murmure... Un bruissement lointain, celui d'une masse humaine qui peu à peu se rassemble.
«
Une belle journée, à n'en pas douter
», songea t-il encore avec un sourire satisfait, enjambant une pile de détritus qui coupait sa route, et où un chien pelé cherchait sa pitance.
A mesure qu'il s'approchait du coeur de la cité, les rues se faisaient plus fréquentées, plus animées.Plus propres aussi. Dépassant le dernier coin de rue aux murs de chaux lépreux, il arriva aux abords de la grande place. Comme d'ordinaire, en un jour de marché, la place était noire de monde, grouillante et animée.
Et pourtant...
Il lui fallait déjà se mouvoir avec adresse pour ne pas de heurter aux badauds qui gênaient sa circulation, et qui ne manqueraient pas d'engager la conversation avec lui, d'échanger leurs impressions, ce qu'il ne voulait à aucun prix.
La progression d'Arfaël vers le centre de la place était lente et pénible, il lui fallait presque se mouvoir tel un
serpent
en de savantes ondulations pour éviter au maximum les contacts avec l'un de ces pouilleux villageois. Chacun de ses sens était en alerte; on n'était jamais trop prudent quant aux mains baladeuses, avides de bourses, qui ne manqueraient pas de vouloir se glisser sous son manteau...
Il n'avait pas à tendre l'oreille pour entendre les conversations alentours. Paris, prêts, négociations... Toutes les affaires qui font l'ordinaire d'un jour de marché. Et pourtant aujourd'hui, aucun étal n'était dressé sur cette place, sous ce ciel menaçant et noir...
Une seule construction provisoire de bois ornait le coeur même de la place... Et tous étaient là, comme de grosses mouches noires attirées par la puanteur d'une charogne... Tous étaient là, petits et grands, miséreux et nantis, tous vautrés dans leur plein droit, les narines frémissantes de curiosité malsaine, de délectation morbide...
Arfaël sourit, sa main effleurant avec satisfaction l'unique arme qu'il possédait sur lui, un stylet finement ciselé, d'une facture que l'on ne trouvait guère plus en ces temps troublés. Un stylet à la lame d'obsidienne qui semblait receler des energies plus noires que la nuit elle-même.
Autour de lui, la foule se resserait encore, se faisant toujours plus dense. Il fronçà le nez avec dégoût, se frayant un passage avec ses larges épaules, sans s'excuser aucunement, résigné cette fois aux contacts physiques qui l'horripilaient tant, mais qui paraissaient désormais inévitables.
Cette... Puanteur.
Ces relents infectes de sueur et de corps mal lavés. Ces miasmes de maladie, de vieillesse...
Tout cela causait en lui une profonde nausée. Il était écoeuré, répugné jusqu'au plus profond de ses entrailles; il avait l'impression de se déplacer dans l'auge d'un porc, au milieu de cette répugnante populace.
Une jeune femme échevelée, vêtue d'une robe en loques au décolleté délacé, se posta soudain devant lui, le regard aguicheur dans son visage outrageusement fardé. Il la repoussa violemment d'un coup d'épaules, s'attirant de sa part des injures dignes d'un soudard, de qui elle les avait sans nul doute apprises. Tournant les yeux sous son capuchon rabattu, il aperçut également deux autres filles de joie qui surgirent comme des diables de leur boîte, s'approchant de tous les hommes en exhibant largement leurs charmes défraîchis.
«
Evidemment
, songea Arfaël avec dédain et dégoût.
L'agitation du jour, cette exitation latente... Cela doit susciter les plus bas instincts d'une bonne partie des âmes de la ville. Faire ressurgir les instincts les plus bestiaux, dissimulés sous le couvert de la civilisation... Absolumment ecoeurant.
»
Il jeta encore un dernier regard à la fille qui s'était jetée sur lui, et qui maintenant se pendait au cou d'un vieillard chenu au crâne chauve constellé de tâches brunes qui la reluquait avec un sourire libidineux et passablement édenté. Ces gens avaient été ses semblables, il avait grandit dans un village semblable à celui-ci, et pourtant...
Aujourd'hui, il était si écoeuré par la race humaine que cela lui donnait envie de... Tuer...
«
Oui...Tordre un cou entre mes mains... Lire la peur, la terreur la plus profonde dans des yeux écarquillés... La distiller comme un venin... Sentir les vertèbres crisser doucement sous mes doigts, puis se rompre en un craquement sec... C'est celà, la vrai jouissance... Le pouvoir de vie ou de mort...
»
Sous sa cape, ses lèvres sensuelles esquissèrent un sourire, et il en oublia même un instant le monde autour de lui, jusqu'à la répulsion que lui inspirait la foule.
Autour de lui, les gens semblaient exités, en totale symbiose avec la chaleur ambiante et la lourdeur de l'air. L'orage, dans le ciel comme dans le coeur des hommes, semblait prêt à éclater...
Enfin, son calvaire prit fin, et il arriva au milieu de la place, se postant à une place de choix pour assister au spectacle. Il pouvait enfin poser son regard sur ce qui était la cause de tous ces attroupements.
Le centre même de la place, où tronait un étal monstrueux. Sur lui, les membres tendus à l'extrême, était couché le condamné, un homme plutôt jeune au regard hagard, dont le corps pâle était couvert de blessures sanguinolantes, en plus des crachats de la foule.
Autour de lui, les gardes du baron de Fwydeel positionnés en cercle le dévisageaient sans sembler le voir, leurs visages de marbre. Et pourtant, Arfaël pouvait y lire la haine, la rancoeur...
Une rancoeur qui n'était rien en comparaison de celle qui se lisait sur les traits du baron lui-même, assis aux premières loges sur son cheval. C'était un homme dans la force de l'âge, la stature encore puissante, le dos droit, et les cheveux à peine grisonants. Il était connu pour sa noblesse d'âme et sa bravoure, au combat comme ailleurs.
Et pourtant le regard qu'il posait sur le condamné ligoté devant lui recelait tout le mal qu'un être humain peut en souhaiter à un autre, une cruauté qui dépasse l'entendement, l'éclat une vengeance qui se doit d'être accomplie.
Mais dans ce regard se lisait aussi une douleur sourde, une blessure à jamais à vif...
La foule se fit silencieuse tandis qu'un hérault vêtu de noir apparût de derrière le baron, et, montant sur les tréteaux aux côtés du condamné, déroula un long parchemin. Après s'être raclé la gorge, il déclara d'une voix de stentor:
-« Oyez, oyez braves gens!
Attendu que, profitant de sa charge et de son poste de serviteur au château de Fydweel, le dénommé Juidin Gyttrain, serviteur au service du baron Dewn de Fwydeel, à dérobé à son maître un objet de grande valeur;
Attendu qu'il s'est attaquée aux nobles dames de Fydwell que sont la baronne et sa fille, ayant fait subir divers sévices à la baronne, avant de la faire passer outre et de démembrer son corps. Il a en outre énuclé et violé la fille unique du baron.
Il est accusé de haute-trahison envers son maître, de vol, de viol et de meurtre.
En conséquence, il sera éventré et depouillé de ses entrailles en ce jour, et jusqu'à ce que mort s'en suive, comme il sied à pareil criminel.»
La foule lançà des hourras enthousiastes, brandissant le poing avec frénésie, tandis que l'air semblait frémir sous leurs cris de : «A mort le traître!», «A mort le chien!», «Au néant le corps et l'âme!».
Arfaël resta silencieux, les lèvres tirées en un sourire dans son visage pâle masqué par sa capuche. Son regard perçant vit le geste presque imperceptible de la main du baron qui se raidissait sur sa cravache, comme s'il semblait vouloir lui-même exercer la sentence, tandis que son second appelait quelqu'un.
Le bourreau sortit de la foule anonyme, son instrument de travail en travers des bras, recouvert d'une toile huilée. Il s'approcha d'un pas qu'il espérait conquérant, bombant le torse, ou du moins la panse qu'il avait lourde et rebondie. Pourtant ses jambes tremblaient. Tremblaient comme un saule face à la tempête.
Arfaël pouvait le voir, sentir sa peur. Il pouvait presque entendre ses dents et ses genoux claquer, songeait- il avec amusement.
Il était évident que cet homme n'avait encore jamais donné la mort...
- «Ce n'est qu'un boucher dépêché à la dernière minute, pour l'occasion... murmura un homme vêtu de satin à un autre, près d' Arfaël, Hormi des carcasses de boeuf, il n'a encore pas découpé grand chose...» ajouta t'il avec un rire gras qui découvrait des dents brunes.
Le bourreau lançà un regard à la foule qui le regardait les yeux exhorbités, puis au condamné, dont le regard brillait d'une supplique muette. En songeant au mal qu'avait fait cet homme, et à la bourse bien garnie qu'on lui avait promis, il se ressaisit, et imagina que la chose devant lui n'était qu'un quartier de boeuf comme tous les autres... Se reprenant, il monta sur l'estrade d'un pas lourd mais résolu, et se positionna jambes écartées à côté du corps ligoté.
La foule retint son souffle dès qu'il se saisit de son épais coutelat, l'extrayant de la toile huilée en un froissement sec, avec des gestes presque amoureux. Sans plus attendre, il le leva à bout de bras, des deux mains, au dessus du corps dénudé du condamné qui hurlait, en tentant de se débattre avec l'energie du désespoir, ne réussissant qu'à arracher plus encore la peau de ses poignets déjà à vif contre les liens solides qui le maintenaient.
Le temps semblait s'être figé dans une éternelle seconde. Chacun retenait son souffle, se mordait les lèvres d'anticipation. C'était fini, le condamné allait ineluctablement mourir. Nulle flèche ne viendrait fendre les airs, nulle clameur en sa faveur ne retentirait.
Personne ne viendrait le sauver, tous le savaient, il allait mourir, ici et maintenant.
Comme au ralenti, le bourreau abaissa son couteau qui vint mordre la chair tendre de l'abdomen en une gerbe de sang écarlate. Le condamné lâcha un long cri tandis que le métal de la lame devenait une partie intégrante de lui-même. Au dessus de lui, le bourreau, les yeux plissés sous l'effort, et le visage maculé du sang qui avait jailli, continua son triste office sous les hourras de la foule qui se comportait à l'image d'une meute de loup affamés, enivrés par l'odeur du sang, et de la proie offerte.
Le couteau dessina une traînée sanglante sur le ventre du condamné, du nombril à la gorge, puis en travers de l'abdomen, à la manière dont on éventre un porc. Sous la douleur, le supplicié relançà un cri, d'intense souffrance et de désespoir mêlés, comparable au cri ultime d'une bête blessée. Son visage couvert de sueur, et déserté de toute couleur se contracta plus encore qu'il ne l'était, et il perdit connaissance.
La foule, déçue, se mit à huer le bourreau, qui n'avait pas sû faire durer le spectacle; mais se tut soudain quand il plongea sa grosse main velue dans les entrailles du supplicié. Le pauvre corps meurtri fût traité comme une carcasse d'animal d'abbatoir, le bourreau se mettant à exercer son art de boucherie avec l'application et la sureté de gestes issus d'une longue habitude.
Chaque lambeau de chair, de peau arraché au corps mutilé, était jeté sur un immense brasier à la droite du bourreau. Les déchets sanguinolents y crépitaient un instant, avant de se raccornir, noircis comme du charbon. Il s'échappait du fourneau une horrible odeur de chair calcinée, ce qui n'était pas pour arranger la chaleur ambiante, d'autant plus qu'un aide s'acharnait à éventer les braises ardentes, dispersant encore plus l'odeur aux quatre vents...
Quand enfin le coeur fût arraché du thorax, comme un oiseau à sa cage, et que le bourreau le brandit entre ses doigts épais et dégoulinants de sang, la foule hurla avec une joie sourde et sauvage, comme possédée par un esprit mauvais, avide d'hémoglobine...
Un éclair zébra brusquemment le ciel noir, et la pluie se mit alors à tomber à verse, éteingnant en un instant les flammes des grills, et délayant le sang du condamné entre les pavés du sol comme une marée pourpre et malsaine.
Raffraîchis, les gens semblèrent soudain se réveiller d'un intense sommeil, laissant les gouttes de pluie glisser sur leurs visages,et quittant l'état de fascination dans lequel ils se trouvaient encore un instant plus tôt. Ils se regardèrent les uns les autres, grommelant dans leur barbe qu'il était temps de rentrer chez soi, qu'ils allaient attraper la mort sous cette pluie, qu'il était l'heure de la soupe...
Un retour au banal du quotidien en somme. Se désinterresant du cadavre qui gisait sur les tréteaux, ils commençèrent à vider les lieux, se protégeant de la pluie comme ils le pouvaient.
Arfaël resta immobile encore un instant, souriant à pleines dents sous son capuchon rabattu. La pluie commençait à percer sa cape pour ruisseler le long de ses vêtements de cuir noir, mais il n'en avait cure...
Il se sentait si bien, si satisfait. Amusé.
Les gens étaient si facile à leurrer, à manipuler...Ils n'étaient que des moutons sans défense, tandis que lui était de la race des loups. Tous étaient venus contempler son oeuvre, jouir du spectacle qu'il venait de leur offrir. La mort d'un stupide serviteur...
Sous son manteau, le stylet d'obsidienne semblait irradier d'une joie mauvaise, comme s'il se gorgeait à sa façon du sang innocent versé pour lui...
Arfaël lançà un dernier regard moqueur au noble guerrier au visage ravagé par la peine, toujours assis immobile sur son cheval, qui contemplait avec mépris et dégoût le corps vidé de ses entrailles que l'on libérait de ses liens, avant d'en couper la tête grimaçante pour la planter sur une pique.
L'homme capé au sourire narquois songea que la femme et la fille du baron avaient été bien jolies. Il avait pû tromper son ennui un moment grâce à elles... Et il avait gagné un splendide artefact et un spectacle en prime.
Amusant, vraiment.
Avec un long rire bas, Arfaël, silhouette noire et indistincte sous les trombes d'eau qui tombaient du ciel, disparût dans une ruelle, à la suite d'autres gens, songeant que le Mal était bien la chose la plus distrayante qui soit...
Pas mal, vraiment sanglant ( gniéhéhé )
La description du dégout du personnage est frappante...
Et son .. je ne sais pas top comment dire ça. Le sentiment dominant de ce texte est très bien représenté dans les pensées du perso.
Chevalier un jour, Chevalier toujours ! Montjoie Saint Denis et Tutti Quanti !
Le personnage est énigmatique, peut-être un peu trop. (quelle est son histoire ? Quelques indices nous auraient aidés à mieux le cerner). Je ne suis pas entré dans le personnage même s'il est plutôt bien présenté.
Le style est lourd (trop de participes présents, par exemple), il y a quelques fautes d'orthographe, des répétitions, des mots mal choisis ou mal employés, des mots anachroniques (hémoglobine, artefact).
Se dressaient des nuages annonceurs (annonciateurs)
des ruelles de la ville déjà désertes (la ville ou les ruelles ?)
répugné (?) suivi (en plus) de répugnante un héraut apparut de derrière le baron
imagina que la chose devant lui n'était qu'un quartier de boeuf comme les autres
l'homme capé
La lecture de l'acte de condamnation a quelque chose d'artificiel. Le baron n'accepterait pas que soient donnés autant de détails sur les crimes concernant son épouse et sa fille, il me semble.
Pareil : j'ai eu du mal à accrocher car les motivations du personnage sont trop obscures.
S'il fait le mal pour le mal, il faudrait qu'on comprenne son geste dans son absence de motivation.
Très bon texte dont le scénario simpliste est sublimé par un style fluide et efficace, fort bien maîtrisé, capable de ménager ses effets et de happer le lecteur par son ambiance palpable. Dommage que de nombreuses fautes d'orthographes, dont quelques grosses, ainsi que des mots ou expressions maladroits, le parsèment. Même si ceci constitue un sérieux problème auquel il faudra remédier, l'essentiel est bien là, et je tiens à adresser à son auteur un grand bravo.
Très bon texte; j'ai bien aimé les petits détails parsemés au fil du récit: la description des ruelles, de la populace rassemblée, le point de vue du bourreau improvisé.
Quelques fautes, qui sont faciles à rattraper pourtant (un passage au correcteur d'orthographe et le tour est joué )