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Les Larmes de Khendis Daï
(Sujet créé par sylesis l 26/03/04 à 22:49)
Un projet qui trainait dans mon dossier depuis près d'un an. Entre deux traductions de nouvelles ( pour le site www.sylesis.fr.st , destiné principalement aux anglophones avec qui je papote beaucoups en ce moment ), j'ai trouvé l'occasion et l'inpisration pour la concrétiser...
Les dieux rêvèrent, et Le Monde fût.
Les dieux imaginèrent de la vie, et Le Monde frémit sous les battements de cœurs naissants.
Les dieux créèrent des merveilles, et Le Monde les acclama.
Les dieux se querellèrent, et Le Monde connu la haine.
Les disputes entre les dieux cessèrent finalement, mais les hommes peuplant Le Monde n’arrêtèrent pas leur combats. Ils combattaient, et se reproduisaient afin que la génération future prenne les armes. Le souvenir des origines du conflit est depuis longtemps perdu, mais la guerre est à présent ancrée dans les gènes du peuple du Monde.
Les dieux tentèrent de calmer leurs enfants, mais n’y parvinrent pas. Devant leur échec, ils abandonnèrent leur création pour trouver une autre distraction. Tous sauf deux.
Shaadri demeura, car il prenait plaisir au spectacle de la guerre. Nombre d’humains le priaient et il récompensait régulièrement les plus pieux, et les plus habiles. Khendis Daï demeura, car il n’avait pas perdu l’espoir de ramener la paix sur Le Monde. On l‘appelait ‘le dieu prêcheur’. Ne pouvant s’opposer à son frère, il était parti parmi les hommes et avait imploré la paix. Ses mots ne trouvèrent aucune oreille et tous lui tournèrent le dos, malgré son statut divin. Devant la réaction générale, il monta en haut d’une montagne et se lamenta sur le sort des hommes, avant de rejoindre sa cité engloutie, éternelle demeure d’un éternel. De ces pleurs naquirent une cascade dont les eaux forment un petit bassin au pied de la montagne. Ce lieu est appelé Les Larmes de Khendis Daï.
La légende dit que celui qui se baigne dans les larmes en rejetant la guerre de tout son cœur disparaît de ce monde. Pour beaucoup, c’est un lieu maudit.
Pour certain, c’est un espoir…
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Anarya Viseltis
Les champs de guerres acclamaient ce nom, les veuves de soldats le maudissaient.
Colonel Anarya Viseltis.
Un nom qui s’était taillé une grande renommée d’abord par l’adresse à l’épée, puis par l’intuition pour guider sa section d’assaut, et finalement par l’intelligence à imaginer des plans de batailles même dans des situations désespérées.
Anarya Viseltis.
Un nom que la vagabonde avait fini par détester plus que tout autre chose au monde, y compris la guerre. Un nom que l’errante habillée de loques avait juré d’effacer du Monde, un nom qu’elle connaissait mieux que quiconque.
C’était le sien.
Anarya avançait péniblement, s’appuyant sur son bâton pour marcher. Elle était loin, cette femme qui portait une armure dorée, cette femme qui affrontait la guerre au milieu de ses soldats.
Sa vie avait pourtant été simple, faite de choses simples. A quatre ans, son père lui avait offert une épée de bois, avant de repartir au front pour mourir d’un carreau dans l’œil. A huit ans, sa mère lui avait offert sa rapière en acier et lui avait enseigné comment s’en servir avec une grande maîtrise. A douze ans, elle s’était enrôlée dans l’armée, comme une majorité des enfants de son âge. Anarya n’avait pas connu d’autre vie –il n’en existait pratiquement pas d’autre sur le Monde- mais elle lui avait parfaitement convenu.
Jusqu’à il y a peu de temps.
Il y a une chose qui est sûre avec les tracés des frontières des royaumes du Monde, c’est qu’aucun cartographe sain d’esprit ne prendrait la peine de les dessiner. Les limites des frontières se cessaient de changer, au gré des victoires et défaites des camps opposés. Chaque camp profitait de la moindre avancée pour conscrire en masse sur le terrain annexée. Il arrivait ainsi régulièrement que des familles soient séparées.
Ainsi, un mois auparavant, Anarya avait été amenée à affronter son frère.
L’armée de Fleishbaum se trouvait au creux de la vallée de Tannhauser, lorsque Anarya et sa légion avaient fini leur déplacement. Ne pouvant profiter d’une meilleure occasion, elle avait lancé l’attaque et prit part au combat. L’affrontement avait cessé lorsqu’elle avait tué le général de Fleishbaum. Soulevant la visière du mort de la point de sa lame, elle avait vu un visage qu’elle avait jadis connu : celui de son frère Tilk, de quatre ans son cadet.
Le prestige et l’honneur sont une chose, la famille en est une autre, même en temps de guerre. Contemplant ses mains rougies par le sang de celui qu’elle avait vu naître et avait tendrement aimé, la jeune femme avait su que sa propre vie venait de s’achever. Tandis que d’autres célébraient, Anarya avait brisé son épée, s’était dépouillé des pièces de son armure, puis ramassé une lance brisée. Elle s’en était servie comme d’un bâton de marche et était partie chercher l’oubli, dans les Larmes de Khendis Daï.
On racontait que ce lieu était maudit, et que les fous ayant renié la guerre n’étaient jamais revenus.
Cela convenait parfaitement à Anarya.
Elle parvint à la cascade légendaire épuisée, mais heureuse : ses tourments ne dureraient bientôt plus. Durant les nombreuses qu’avaient durée son voyage, Anarya avait revu son frère, lui demandant pourquoi il était mort. Les nuits avaient passé, et d’autres visages avaient joint leur complainte à celle de Tilk. Elle avait fini par ne plus dormir que quelques minutes d’affilées, pour fuir les rêves.
S’approchant du bassin formé par la cascade, Anarya commença à se dévêtir et à enlever les lambeaux de ce qui auparavant aurait fait pâlir les femmes de la cour. Son corps lui-même était l’image de la guerre, sévèrement marqué par les cicatrices. On pouvait toutefois deviner un visage qui avait auparavant été joli, sous les balafres.
La jeune femme s’appuya sur les bords et entra dans l’eau du bassin naturel. La clarté de l’eau lui joua des tours, car le bassin s’avéra plus profond que prévu, et au lieu de patauger, Anarya se retrouva avec de l’eau lui atteignant le niveau des seins. La jeune femme s’approcha de la chute d’eau et se plaça dessous, puis sentit la pureté du liquide laver son corps et son âme. Elle sentit une caresse, un délicat contact touchant son esprit, allégeant son fardeau et lui donnant la force de vivre avec ses souvenirs. Pour la première fois de sa vie, Anarya su que la guerre n’était pas la seule alternative du Monde, et connu une paix nouvelle. Son corps également fut débarrassé des effets des conflits. Ses cicatrices se détachèrent en coulant le long de son corps, comme des impuretés se décollant sous l’effet d’un brossage. Ses jambes se rapprochèrent et se fondirent en un seul membre qui se couvrit de fines écailles délicatement bleutées, ses pieds devinrent une nageoire ; des branchies apparurent à la base de son cou.
Anarya vit alors un passage sous l’eau et s’enfonçant sous la montagne. Sans une hésitation, elle plongea et l’emprunta, nageant avec la grâce et la dextérité qui étaient maintenant siennes. Le passage se prolongea sur une grande distance, mais l’ancienne militaire n’y prêtait pas attention, pouvant respirer parfaitement à son aise sous l’eau. Les changements physiques qu’elle venait de vivre ne l‘affectaient pas véritablement : elle était venue pour mourir, mais il lui semblait qu’on lui venait de lui proposer autre chose et elle l’acceptait avec joie.
Anarya nagea pendant une heure - ce qui n’était pas trop pénible, car un courant la portait – quand elle vit finalement de la lumière.
Emergeant du tunnel, elle découvrit une sorte de cité autour de laquelle évoluaient des être semblables à elle-même. Ils l’aperçurent également et vinrent à elle, l’accueillant parmi eux comme une petite sœur égarée qui vient juste de retrouver le chemin de la maison. C’est lorsqu’ils l’amènent au centre de la cité, ou se trouvait un homme d’apparence âgée qu’Anarya comprit ce qu’étaient les larmes de Khendis Daï. La cascade et le bassin étaient une porte qui menait les gens hors de portée de la guerre, vers une autre vie. En un sens, les superstitions étaient vraies : quiconque va aux Larmes en reniant la guerre n’est plus jamais revu, car on lui donne la possibilité de la fuir à jamais
Après avoir remercié le dieu pour le don qu’il lui avait fait, car le vieillard était bien Khendis Daï, Anarya parti rejoindre les siens, sa nouvelle famille en quelques coups de nageoire, et découvrit enfin le bonheur.
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Des pleurs du dieu prêcheur naquirent une cascade dont les eaux forment un petit bassin au pied de la montagne. Ce lieu est appelé Les Larmes de Khendis Daï.
La légende dit que celui qui se baigne dans les larmes en rejetant la guerre de tout son cœur disparaît de ce monde. Pour beaucoup, c’est un lieu maudit.
Pour certains, c’est une rédemption